Le ministre Dacic dans l’interview de la semaine de Kurir sur ce qui nous attend

29. jan 2023.
La grande Quinte a remis un document au président de la Serbie Aleksandar Vucic, presque un ultimatum, du moins tel qu'il est perçu par le public - le plan franco-allemand pour le Kosovo, et le chef de l'État a déclaré dans son adresse aux citoyens qu’on lui avait répété trois fois quelles seraient les conséquences si nous ne l'acceptons pas.

Est-ce vraiment un ultimatum, y a-t-il une marge de manœuvre pour améliorer quoi que ce soit de ce plan en notre faveur et quelle est la prochaine étape pour nous, nous avons demandé le Premier Vice-Premier ministre et chef de la diplomatie Ivica Dacic, qui était à Bruxelles le lendemain et s'est entretenu avec le haut représentant de l'UE Josep Borrell. Dacic révèle à Kurir à quoi ressemblait cette conversation, ainsi que ce à quoi ressemblera dans la pratique notre réponse à la dernière proposition.

- La chose la plus importante est que notre peuple comprenne que nous participons à chaque accord et que l’intérêt de la Serbie est protégé dans chacun de nos entretiens. C'est la principale différence par rapport à certaines situations antérieures, quand ils ne nous demandaient rien, ils ont juste pris des décisions, et nous restions de côté. Maintenant que la Serbie est au centre de la prise de décision, aucune décision ne pourra passer sans nous. C'est pourquoi Aleksandar Vucic a pris la bonne décision que nous participerons au dialogue basé sur ce plan, avec les lignes rouges à savoir qu’il n’y a pas d’adhésion du Kosovo à l'ONU mais il y a la ZSO précédemment formée. Avec tout cela, on nous a présenté clairement les conséquences si la Serbie est celle qui fait obstruction à l'accord, tout d'abord avec de graves conséquences pour l'avenir de la Serbie.

Une version présumée de 10 points est apparue dans le public, et Lajcak a déclaré qu'aucune de ces versions n'est vraie et que le document comporte 11 points. Vous, en tant que chef de la diplomatie et Premier Vice-Premier ministre, avez dû voir le document... Est-il plus doux ou bien pire que les versions parues? Qu'est-ce qui est le plus difficile pour nous?

- Je le répète, nous discutons de différentes options. Mais il faut savoir qu'aucune version ne sera facile. Le temps des solutions faciles est révolu depuis longtemps et depuis dix ans on ne parle que de solutions possibles, ni faciles ni difficiles. Cette année, cela fait exactement dix ans que nous avons signé l'accord de Bruxelles avec Pristina et avec Bruxelles. Et ce fut une solution difficile, mais c'était la meilleure possible à l'époque. Aujourd'hui encore, elle la meilleure possible même si elle n'a pas été mise en œuvre en raison du blocus de Pristina et de ceux qui les soutiennent. Je veux dire que pour le Kosovo-Metohija, nous recherchons des solutions qui puissent être appliquées dans la réalité, pas dans un laboratoire. Nous pensons à la Serbie et aux Serbes du Kosovo-Metohija lorsque nous cherchons une solution, pas une idée imaginaire qui nous convient, mais qui ne peut pas être mise en œuvre.

Les analystes disent que la Serbie ne doit pas permettre un autre «non» historique à l'Occident, car nous nous souvenons de ce qu'il nous a apporté dans le passé. Vous vous souvenez aussi, votre parti était le groupe au pouvoir à l'époque... Alors que dites-vous maintenant, en tant que chef de la diplomatie, mais aussi leader du SPS et acteur de l'époque quand on disait «non»? Quelles sont nos options déjà?

- Nous parlons à plusieurs pays occidentaux, comme vous le dîtes- il y a des Américains, des Allemands et des Français, des Britanniques, des Italiens, et il y a Lajcak. Ils ont tous leurs propres intérêts et attentes. Mais nous les traitons comme des partenaires qui essaient de nous faire parvenir à un compromis avec les Albanais du Kosovo, et c'est pourquoi nous sommes dans ce processus depuis plus de dix ans. L'Occident est le facteur avec lequel la Serbie cherche une solution pour le Kosovo-Metohija, il en est ainsi depuis que, contre notre volonté, le dialogue a été déplacé de l'ONU vers l'Union européenne. Et c'est la réalité. On ne peut pas chercher une solution ailleurs, c'est le cadre dans lequel on évolue. Et il faut toujours garder à l'esprit qu'il s'agit de pays avec lesquels la Serbie réalise les deux tiers de ses échanges et de pays qui emploient plusieurs centaines de milliers de personnes en Serbie. Quelqu'un dit que cela n'a rien à voir avec les pourparlers sur le Kosovo-Metohija, et je leur demande - essayez de séparer ces deux choses.

La majorité évalue aussi que l'Occident ne tire pas avec un pistolet vide, et que les menaces sont réelles et que les conséquences, si nous refusons de parler, seraient catastrophiques? Quel scénario nous attendrait? Des sanctions comme dans les années 90? Qu’est- ce qu’ils nous ont-ils montré?

- Il n'y aura pas de sanctions contre la Serbie, non pas parce que personne ne veut le faire, au contraire - beaucoup imposeraient des sanctions à la Serbie demain. Mais nous ne le permettrons pas car chacun de nous, y compris Vucic et moi-même, sait que c'est l'une des périodes les plus difficiles que la Serbie ait traversées. Nous prenons des décisions au nom du peuple qui nous a élu présidents et ministres, et nous devons poursuivre des politiques qui ne conduiront pas à des suppressions d'emplois. Ceux qui disent que ce n'est pas important pour eux, qu'ils aillent voir ces gens et essaient de leur expliquer qu'ils seront renvoyés parce que c'est important pour l'État et la nation. Pour nous, il n'y a pas de plus grand intérêt d’État que pour chacun d'avoir un travail et de vivre paisiblement avec sa famille dans son foyer en Serbie.

Le lendemain de l'allocution du président Vučić, vous étiez à Bruxelles et vous êtes entretenu avec Borrell. Décrivez-nous exactement à quoi ressemblait cette conversation?

- La conversation avec Borrell a été constructive. Il est très important que Bruxelles ait qualifié l'attitude du président Aleksandar Vučić de constructive et de responsable, contrairement à Kurti. L'UE a certains dilemmes concernant l'accord de Bruxelles, mais c'est dans ces locaux où j'ai parlé avec Borrell que j'avais signé cet accord avec Catherine Ashton. Cet accord comprenait la ZSO. Donc, si le garant de cet accord était alors le haut représentant pour la politique étrangère de l'UE, il est logique que ce soit encore le cas aujourd'hui, et que nous attendions la ZSO en vertu de ces principes.

Des formulations telles «lignes rouges», «Le Kosovo est le cœur de la Serbie», etc. nous les entendons dire depuis des décennies déjà... Soyons concrets maintenant, comment cela se passera-t-il dans la pratique - l'Occident formule une demande spécifique - laissez le Kosovo adhérer à l'ONU, soit vous ne vous y opposez pas et nous disons quoi?

- Nous disons que le Kosovo n'est pas un pays indépendant et qu'il ne devrait pas être membre des Nations Unies. Et cela n'est pas seulement dit par la Serbie, c'est dit par une majorité écrasante des membres de l'ONU. Qu'ils leur demandent si le Kosovo est un pays indépendant et qu'ils entendent ce qu'ils en pensent. La plupart leur diront que ce n'est pas un État, et deux des cinq membres permanents du Conseil de sécurité leur diront la même chose. Qu'ils demandent à leurs membres de l'Union européenne si le Kosovo est un pays indépendant et ils verront que cinq pays pensent que ce n'est pas le cas. Qu'ils posent la même question à l'OTAN - quatre membres diront que le Kosovo n'est pas un État. La situation est la même à Interpol et à l'UNESCO. Je ne sais pas comment ils envisagent de les faire adhérer à ces organisations. Ce n'est pas une question pour la Serbie, ils devraient se poser cette question.

L'accent est à nouveau mis sur la question de la formation de la ZSO, qui aurait dû être formée il y a longtemps, et maintenant les États-Unis sont également devenus actifs... Pouvons-nous nous attendre à une avancée et les États-Unis réussiront-ils vraiment à «forcer» Pristina de former la ZSO comme cela a été signé à Bruxelles? Ou est-ce aussi une sorte de mise en scène?

- Nous attendons la formation de la Communauté des municipalités serbes et nous saluons les déclarations de l'Occident, et en particulier des États-Unis, stipulant que cela sera fait. Il est depuis longtemps clair pour tout le monde que nous ne pouvons pas faire un seul pas en avant tant que quelque chose qui attend depuis dix ans n'aura pas été accompli. En même temps, ce n'était pas peu de chose, c'était la principale demande de notre côté. Nous avons persisté dans la demande de formation de la ZSO, à la fois parce que c'est notre demande la plus importante dans le dialogue, mais aussi parce que nous prenons ces négociations au sérieux et de manière responsable, où nous considérons que tout ce qui a été convenu doit être respecté.

Des échéances pour résoudre la question du Kosovo ont été évoquées récemment, dont le mois de février, anniversaire du conflit russo-ukrainien, puis mars... L'un des officiels occidentaux vous a-t-il mentionné une échéance précise et laquelle?

- Je ne fais attention à aucune mention de délais, ce ne sont pas des choses sérieuses. Il n'y a pas non plus de délais dans les conversations que je mène, je suis sûr que personne non plus ne mentionne de délais au président Vučić. Je ne dis pas, quelqu'un pourrait avoir en tête quand une phase de notre dialogue devrait se terminer, mais il y a beaucoup de gens là-bas, ils ont des obligations et des attentes qui leur sont propres, ils ont aussi des mandats qui durent un certain temps, peut-être ils reflètent cela sur nos conversations. Nous n'avons pas cela. Les pourparlers dureront le temps qu'il faudra pour parvenir à un compromis, et c'est tout ce qui compte. Le temps est moins important que la qualité de l'accord sur lequel nous travaillons.

L'assemblée sur le thème du Kosovo-Metohija est prévue pour le 2 février, car les représentants de l'opposition ne voulaient pas d'entretiens individuels avec le président. Qu'attendez-vous de cette séance?

- Le président Vučić a offert les consultations et les discussions les plus larges possibles car il s'agit de notre problème d'État le plus important. Son intention c’est de discuter de la question du Kosovo-Metohija avec tous les acteurs politiques - qu'ils soient au pouvoir ou dans l'opposition, car il n'y a pas de sujet plus important que celui-ci. Mais certains ne voulaient pas en parler, et pourquoi ils ne l'ont pas fait, ils devraient l'expliquer à leurs électeurs. Pour autant que je sache, ils n'ont aucune explication à cela, il leur sera probablement difficile de venir à l'Assemblée pour parler du Kosovo-Metohija. Mais cela ne parle que d'eux, car il est très facile de se mettre en arrière-plan et de critiquer Vucic et Dacic, et quand vous leur demandez quel est votre plan pour le Kosovo-Metohija, ils disent que Vucic devrait quitter le pouvoir. Nous aurons un débat parlementaire parce que ni le président ni le gouvernement n'ont rien à cacher au public et au parlement sur ce qui se passe dans le dialogue sur la question du Kosovo-Metohija. C'est notre message, c'est le motif du président Vucic d'ouvrir cette session. Je n’arrive pas à comprendre comment quelqu'un qui veut être dans la politique fuie le débat sur le Kosovo-Metohija, je ne sais pas quelle est pour eux la question d'État plus importante.

Y a-t-il une possibilité d'organiser un référendum sur le Kosovo-Metohija après ce document qui nous a été remis?

- Nous sommes encore loin de toute décision sur ces questions, en particulier de l'histoire de savoir si nous avons besoin d'un référendum ou non. Nous avons d'abord devant nous le débat parlementaire et nombre d’autres entretiens avec des représentants internationaux et avec Pristina, si bien que la prise de quelconque décision prendra plus de temps. En tout état de cause, le moment venu, je suis favorable à la création du consensus le plus large sur les solutions futures pour le Kosovo-Metohija.

Source/Photo: Kurir.rs/Nemanja Nikolić